dimanche 21 novembre 2010

Hongrie - Externalisation et droit du travail

Il est fréquent de nos jours que les entreprises confient la réalisation de certaines de leurs activités à un tiers. L’externalisation ou « outsourcing » répond souvent à la préoccupation de réduire les coûts de fonctionnement mais peut également avoir pour objectif d’améliorer la qualité du service ou encore de réduire la charge administrative de l’entreprise.

Dans le cadre des négociations, les parties doivent garder à l’esprit que dans certains cas l’opération d’externalisation peut être qualifiée de « transfert d’entreprise » soumis à un régime spécifique prévu par le Code du Travail hongrois. Une bonne connaissance de ses critères et de ses conséquences est nécessaire pour évaluer l’opération de manière adéquate afin d’éviter tout risque.

Transfert d’entreprise
Aux termes du Code du Travail hongrois, transposant la Directive communautaire 2001/23/CE, est qualifié de transfert d’entreprise « le transfert conventionnel d’un ensemble autonome organisé d’éléments corporels ou incorporels (…) en vue de la poursuite ou de la reprise de l’activité en question par une personne relevant du champ d’application du Code du Travail ».

Transfert d’une entité économique conservant son identité
Les critères du transfert d’entreprise dégagés par la Cour de Justice des Communautés Européennes (la « CJCE ») en 1986 dans son arrêt Spijkers sont encore aujourd’hui appliqués par les juges nationaux. Pour la CJCE, le critère décisif pour établir l’existence d’un transfert d’entreprise est celui du maintien de l’identité de l’entité.

Maintien de l’identité de l’entité transférée

Les juges nationaux doivent ainsi rechercher s’il y a transfert d’un ensemble d’éléments d’actifs corporels ou incorporels (tel que usine, partie d’usine, magasin, site) nécessaire à l’exploitation de l’activité dans des conditions similaires.

A cet égard, selon la CJCE, il y a lieu de prendre en considération l’ensemble des circonstances de fait qui caractérisent l’opération en cause, au nombre desquelles figurent notamment :
- les caractéristiques de l’entité et le degré de similarité des activités exercées avant et après le transfert ;
- le transfert ou non d’éléments corporels et incorporels (par ex. know-how) ainsi que leur valeur ;
- la reprise ou non de l’essentiel des effectifs ;
- le transfert ou non de la clientèle.

La plupart des externalisations ne s’accompagnent pas de « transfert d’éléments d’actifs » et consistent simplement pour une entreprise à confier à un tiers la réalisation d’une activité précédemment assurée par ses salariés. La CJCE a admis cependant dans son arrêt Schmidt que l’absence de transfert d’éléments d’actifs ne saurait suffire à exclure l’opération du champ de la directive, en considérant que l’externalisation d’une activité accessoire réalisée par un seul salarié, sans transfert d’éléments d’actifs, pouvait constituer un transfert d’entreprise. En l’espèce, une société avait confié le nettoyage de ses locaux, jusqu’alors assuré par le seul salarié affecté à cette tâche, à une entreprise extérieure et avait prononcé le licenciement de celui-ci.

Notion de transfert

Le transfert doit être fondé sur un accord par lequel le contrôle effectif de l’entité économique est transféré à un tiers.

Conséquences du transfert d’entreprise

Sort des droits et obligations nés de la relation de travail

Tout transfert d’entreprise emporte de plein droit transfert au successeur des droits et obligations nés des relations de travail. Le salarié conserve le bénéfice de l’ancienneté acquise au service du précédent employeur. Dès lors, en cas d’un éventuel licenciement ultérieur du salarié, celle-ci devra être prise en compte lors du calcul du préavis et de l’indemnité de licenciement. La conclusion d’un nouveau contrat de travail n’étant pas requise, le nouvel employeur ne peut imposer au salarié une nouvelle période d’essai.

Le contrat de travail en cours lors du transfert doit être maintenu dans les mêmes conditions. Toutefois, la modification du contrat de travail par le nouvel employeur n’a pas pour effet, en elle-même, de faire échec à la qualification de transfert d’entreprise.

Le sort juridique des obligations spécifiques liées à la relation de travail, telles qu’une obligation de non-concurrence, n’est pas clairement réglé par le droit hongrois. L’accord de non-concurrence est un accord de droit civil et, partant, n’est pas transféré automatiquement au successeur. Son maintien au sein du nouvel employeur doit faire l’objet d’un accord spécifique entre les parties concernées (cession de créance, cession de dettes).

Absence de droit de refus du salarié

La Cour Suprême de Hongrie ne reconnaît pas au salarié le droit de refuser le transfert de son contrat de travail. Le changement d’employeur s’impose ainsi également aux salariés dont non seulement les droits mais également les obligations sont transférés. Ainsi, le salarié dont le contrat est transféré commet une faute grave justifiant son licenciement « extraordinaire » en refusant de prendre son poste auprès de son nouvel employeur.

Protection contre le licenciement
Le transfert d’entreprise ne peut fonder en lui-même le licenciement dit « ordinaire » du salarié. Le principe de la poursuite des contrats de travail ne s’oppose en revanche aucunement à ce que le nouvel employeur mette fin, après le transfert, aux contrats de travail des salariés transférés dans les conditions de droit commun (par ex. au motif d’une réorganisation).

Les externalisations emportent des conséquences différentes selon que celles-ci sont qualifiées de transfert d’entreprise ou non. En cas de contentieux, le juge pourrait considérer que les licenciements prononcés par le précédent employeur sont illégaux ou contraindre le prestataire de services à reprendre les salariés concernés. Il est donc primordial que dès le stade de la préparation de l’opération les parties examinent avec diligence la portée des termes envisagés de leur accord afin de caractériser un éventuel transfert d’entreprise.

Plus d'information sur le site suivant:

http://www.francemondexpress.fr/hongrie-externalisation-et-droit-du-travail,933.html